Mercredi 16 octobre 2024 par Martine
NB : Cet article aurait du être publié avant celui de la "mare ante"
Randonnée culturelle et viticole
Ah mes amis, nous avons bien failli ne pas atteindre Hautrégiville. Déjà que ce village a un nom à coucher dehors mais il doit recéler des trésors si merveilleux que la voirie s'ingénie à vous empêcher d'y entrer. Cela commence par rendre impossible la sortie de la quatre voies sans vous prévenir en amont. Quand vous trouvez enfin un panneau, il vous indique que la prochaine sortie se fera ...à Vouziers ! Au secours !!! Heureusement, au bout du fil, votre animateur vous rassure et vous indique un itinéraire de "délestage". Entre RE et bison futé il y a finalement beaucoup de ressemblances et le groupe réussit à se rassembler sur la place.
Pierre nous avait préparé un itinéraire riche en découvertes sous un soleil éclatant et surprenant après ces mois de disette solaire. Les images parlent d'elles-mêmes. Il est vrai que vous êtes un peu plus blasé avec le recul, toute la semaine a été merveilleuse mais ce 16 octobre nous avons eu le sentiment d'être très chanceux mais...nous le valons bien.
Tout le monde connaît la légende des oies du Capitole mais cela va mieux en la racontant à nouveau : Toute cette incroyable histoire se déroule au IVe siècle avant notre ère, vers l'an 390 av. J.-C. Voilà déjà près de deux cents ans que des Gaulois ont franchi les Alpes et sont descendus dans la Péninsule. Aucune de ces tribus n'a encore osé pénétrer dans l'Apennin. Les premiers à s'aventurer vers Rome, cité réputée pour son opulence, ce sont les Sénons.
Au cours d'une expédition militaire, ils font le siège de Clusium (Toscane), qui appelle immédiatement ses voisins romains au secours. C'est un signal pour les envahisseurs, qui décident de longer le cours du Tibre et d'affronter les armées romaines. Se repliant dans Rome, les défenseurs se retranchent avec leur or et leurs vivres dans le Capitole, l'une des sept collines de la cité. Pendant des mois, les envahisseurs pillent la ville et campent au milieu des ruines en attendant le moment favorable pour attaquer.
Pendant ce temps, la résistance s'organise. C'est pourquoi les Gaulois veulent en finir. Par une nuit sans lune, ils montent jusqu'au pied du rempart de la citadelle. Sans bruit, quelques hommes atteignent les fortifications quand tout à coup des cris effroyables se font entendre, donnant l'alerte.
Ces cris sont ceux des oies du Capitole, consacrées à la déesse Junon, fille de Saturne et de Rhéa, épouse de Jupiter, reine du Ciel. Malgré la famine du siège, les romains n'ont pas mangé les oies qui sont d'essence divine, un peu comme les vaches en Inde. Immédiatement alerté, le patricien Manlius est le premier à repousser les assaillants. Devant leurs échecs répétés, nos ancêtres acceptent de quitter les lieux contre mille livres d'or. C'est ainsi que nos oies sont entrées du même coup dans l'Histoire !
Vous devez vous dire : mais que viennent faire ici ces oies et ce rappel historique. Ils sont dus à quatre gardiennes marnaises postées sur le seuil de cette maison et qui, oh surprise, n'ont pas bavardé à notre passage. Or c'est bavard une oie, soit elle cacarde, soit elle siffle, soit elle criaille, mais elle est toujours assourdissante. En fait elle est affolée par les odeurs et bruits qui ne lui sont pas familiers. Quinze randonneurs extrêmement curieux n'ont pas réussi à leur tirer un seul petit cri contrairement à tous les chiens croisés sur notre route. On ne peut plus faire confiance à personne !
Non je n'ai pas fait de zoom. Ces piquets sont à leur taille normale. Drôles de piquets, en métal de surcroît, pour grandes vignes me direz-vous. Enfin vous ne me direz rien car il faut être fort pour en placer une quand je parle ou que j'écris.😂
Il s'agit d'une expérimentation en cours dans le vignoble champenois pour accompagner l’indispensable transition agroécologique : adapter le vignoble au changement climatique tout en préservant la qualité et la typicité des vins de Champagne ainsi que la durabilité économique des exploitations. Dès 1986, les premières parcelles expérimentales conduites en lyres ont été plantées avec des écartements compris entre 3 et 4 mètres et des densités variant entre 2 700 à 3 000 ceps/ha comme celles-ci.
En 1995, pour compléter le dispositif, deux parcelles ont été installées en vignes semi-larges (VSL) sur les domaines expérimentaux. Pour les VSL, l’écartement entre pieds devait se situer entre 0,9 et 1,2 mètre et entre rangs entre 1,8 m et 2,2 m pour une densité allant de 3 790 pieds à 6 170 pieds/ha. Au vu des résultats, les lyres ont été abandonnées au profit des VSL.
L’un des objectifs de la conduite en VSL est de favoriser l’enherbement, la largeur de l’inter-rangs facilitant son implantation et son développement. Ce facteur favorise la porosité du sol et donc l’infiltration de l’eau, diminuant l’érosion et le tassement et empêchant des pertes d’azote trop importantes par lessivage. Le travail dans ces VSL évite les mauvaises postures, il peut être davantage mécanisé pour faire face à la diminution des travailleurs agricoles. Enfin le traitement chimique est considérablement réduit par ce type de tracteurs adapté aux VSL qui diminue la quantité de pesticides à épandre et protège l'environnement.
Les VSL constituent une réponse partielle au changement climatique (meilleure résistance au gel de printemps, comportement correct en cas de contrainte hydrique, acidité des raisins plus élevée, pH plus faible), mais les grappes, plus exposées, sont plus sensibles à l’échaudage et à la grêle. Les VSL ont des caractéristiques intéressantes pour s’adapter au changement climatique mais ne constituent probablement pas un levier majeur d’adaptation, contrairement aux perspectives offertes par le matériel végétal par exemple.
PS : Je ne suis pas devenue une spécialiste du vignoble champenois, j'ai juste lu les 123 pages du rapport d'expérimentation du comité de champagne que je vous recommande. Que ces spécialistes veuillent bien excuser le "résumé" amateur.
Je n'en ai pas fini hélas tant ce parcours fut riche de découvertes. Vous pouvez vous arrêter là définitivement (personne ne contrôle) ou prendre une petite pause et revenir demain...s'il pleut. Et pour rester dans le jus voici une suggestion pour la pause...
Nos pas nous ont conduits jusqu'à Saint Masmes, l'un des villages ouvriers de la vallée de la Suippe. Il en est des villages ouvriers comme des cîtés jardins en ville ( chemin vert à Reims par exemple). C’est en Champagne Sèche, qu’à la fin du XVIIIe, sous la poussée de vecteurs économiques et démographiques favorables, se développent dans la vallée de la Suippes un ensemble de villages ouvriers.
Deux vecteurs économiques prédominent alors en Champagne-Ardenne : le premier, lié à la production de vin, le second lié à l'élevage du mouton et à l’économie qui y est liée : la laine En effet, avant de devenir, à partir de 1960 une région de production d'agroalimentaire, la Marne était un producteur important de tissus de laine. La vallée de la Suippe se prêtait particulièrement bien à cette économie, d’une part la rivière éponyme qui la traverse, d'un débit constant, apportait aux usines la force motrice suffisante pour leur production, et l’eau en abondance pour le travail de la laine qui en nécessite une consommation importante. D’autre part les sols très calcaires n’étaient pas propices à la culture mais favorables à l'élevage des moutons sur les savarts.
Oui nous sommes sur le calcaire :
85 sites ont été recensés qui correspondent à des filatures : 38 sont situés dans les Ardennes, 30 dans la Marne (12 à Reims et 14 dans la vallée de la Suippe) ; 14 dans l'Aube et 3 seulement dans la Haute-Marne.
Les villages ouvriers qui forment un chapelet le long de la Suippe ont été crées par une bourgeoisie catholique. Ils sont juxtaposés à des villages traditionnels plus anciens, mais marquent une différence dans leur structure. Elle se compose des mêmes éléments : une usine mère associée à une ferme, des maisons ouvrières, une maison patronale, des maisons de contremaître, une école, une coopérative, une infirmerie, une garderie, des entrepôts, une gare et un lieu de culte. Ce lieu de culte a souvent une place déterminante par rapport à l’usine.
Comme les cîtés jardins en ville, on recherche une autonomie de la structure urbaine, à la fois dans son fonctionnement mais aussi économiquement, ce qui fait dire qu’ils sont des communautés à part entière et non de simples extensions des villages traditionnels. Tous les villagesillages ouvriers avaient la même fonction : production de tissu de lainage.
Dans ce système autonome, l’usine mère est au centre du dispositif. Elle génère le travail. L’usine, est créée et dirigée par un double patronat : un patron catholique et un propriétaire foncier. Le patronat offre aux ouvriers des services : gratuité du logement, de l’école, des soins médicaux, de la garderie. En somme il tisse autour de l’ouvrier un tissu social. Il vit dans un système clos où la religion et le travail, comme promesses du salut, sont érigés en morale. À cela deux raisons : Premièrement sédentariser la masse ouvrière, en effet jusqu’au milieu du XIXe siècle, la masse ouvrière est très changeante et très mobile. Deuxièmement, il fallait rendre dépendante la classe ouvrière afin de mieux la contrôler, socialement mais aussi intellectuellement. Un ouvrier qui quittait son emploi perdait son logement mais aussi toute sa vie sociale. L' emprise de l'usine sur le territoire, et sa position permettent qu’elle soit vue et perçue comme l’élément majeur, porteur de symbole : l’usine mère c’est l’usine nourricière celle qui apporte la paix sociale. Autour de l’usine s’organise, de manière hiérarchisée, l’ensemble de la vie sociale et économique. A Saint Masmes, le calvaire se trouve à l’entrée du chemin qui mène à l’usine, de fait chaque ouvrier passe plusieurs fois par jour devant. Les maisons ouvrières bordent la rue principale, elles se trouvent en continuité avec l’usine et font le lien avec le restant du dispositif. La maison patronale se situe au dessus des maisons ouvrières. On y accède par une allée jonchée d’arbres. Une large grille ferme cette propriété. Plus haut le chemin ouvre sur un ensemble de bâtiment regroupant école, coopérative, infirmerie… l’ensemble des services offerts par le patron aux ouvriers.
L'ensemble de ce dispositif urbain est un site ouvert, nulle barrière, nulle clôture, nul marque de discontinuité, c’est l’espace de la transparence. Cet espace ouvert offre l 'idée que chacun participe d'un mouvement unique, que chacun fait partie d’une même communauté, un espace où l’on voit tout. L’ouvrier, l’individu, n’est considéré qu’à travers le groupe, comme élément de l’ensemble. Dans ce cas nul besoin de marquer sa différence : la maison, l’usine, l’école, la coopérative sont construits dans les mêmes matériaux, sur les mêmes bases. L’espace social s’uniformise aussi, si la clôture marque la propriété privée, on signifie par son absence l’appartenance forte à la communauté en effaçant petit à petit l’espace privé. Notons, que seule la maison patronale, est un site clos, un mur d'enceinte délimite l'espace privé du patron. C'est le modèle type du "patriarcat".
Dans tous les villages est érigé un lieu de culte qui prend des formes différentes : calvaire, église, chapelle. Trois sites comportent une chapelle : dans les Ardennes à Givet (La Soie artificielle), et dans la Marne à Warmeriville (ancien site Harmel) et à Saint-Masmes (usine du Pont de La Romagne). ce sont les témoins du catholicisme social dans le milieu du textile dans la région. Celle de Saint Masmes reprend la forme de la grotte de Lourdes à droite avec calvaire au-dessus et mise au tombeau.
Saint Masmes est riche aussi d'une très belle église romane classée. qui se situe dans la partie village classique et non dans le village-ouvrier.
Randonnée très riche culturellement et rédactrice bien sérieuse, revenue à son état ancien de prof, allez-vous me dire. Où est donc passé l'humour des habituels articles ?
Ne désepérez pas, vous l'avez bien mérité. Les russules, champignons très communs nous ont offert les premiers petits rires en-dessous, devenus très vite fous rires, surtout masculins il est vrai mais bien relayé ensuite pas les voix féminines, soyons honnêtes.
Pierre a su nous offrir des arrêts bienvenus dont celui-ci où il a eu la délicatesse de venir la veille installer des toilettes volantes. Qu'il en soit remercié.
Pendant ce temps, les "hommes" attendent sagement tout en discutant... savamment ?
Retour à la fin de cette belle randonnée à Heutégiville où certains villageois poussent l'art de la décoration très loin, jusqu'aux boites aux lettres.
Ils ne sauront jamais faire mieux que dame nature cependant !
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